Zola et la prostitution ou le « contre-𝑐𝑎𝑟𝑒 nanesque Â»

Charles Plet

 

NeuviĂšme roman des Rougon-Macquart prĂ©publiĂ© en feuilleton dans Le Voltaire du 16 octobre 1879 au 5 fĂ©vrier 1880 (avant de paraĂźtre en volume chez Charpentier le 14 fĂ©vrier), Nana explore l’univers des plaisirs parisiens sous le Second Empire. « Roman de la prostitution1 Â» qui voit le jour lors de l’apogĂ©e du naturalisme, Nana offre en effet au lecteur la description systĂ©matique d’une fin de rĂ©gime minĂ©e par le phĂ©nomĂšne prostitutionnel. Aussi, loin de l’« ambiance feutrĂ©e2 Â» d’Une page d’amour, le nouveau roman de Zola n’hĂ©site pas Ă  verser dans l’impudeur et le « manque de propretĂ©3 Â», Ă  l’instar de Marthe, histoire d’une fille (Huysmans, 1876) et de La Fille Élisa (Edmond de Goncourt, 18774) quelques annĂ©es plus tĂŽt. Mais contrairement Ă  ses amis littĂ©raires, Zola ne porte pas son attention exclusivement Ă  la condition misĂ©rable de la prostituĂ©e de rue : c’est tout l’éventail des formes du « service/travail prostitutionnel5 Â» (qui va de la courtisane Ă  la fille encartĂ©e en passant par la proxĂ©nĂšte) qui est introduit dans Nana et qui participe Ă  brosser un tableau exhaustif des activitĂ©s et des agents du vice impĂ©rial. Ces diffĂ©rentes formes de service sont concentrĂ©es en un personnage de jeune femme Ă  la fois dominant et dominĂ©, victime (de la sociĂ©tĂ© masculine) et bourreau (des hommes), ange et dĂ©mon : l’éclatante et effrayante Nana, fille de Gervaise et de Coupeau autour de laquelle se constitue le personnel du roman et qui ne tardera pas Ă  incarner aux yeux des lecteurs le « mythe naturaliste6 Â». Car loin de n’ĂȘtre qu’un produit fĂ©minin directement issu de la rĂ©alitĂ© extratextuelle, Nana « tourne au mythe Â» (selon la cĂ©lĂšbre formule de Flaubert7), rĂ©vĂ©lant tout Ă  la fois les obsessions de son auteur relatives Ă  la fĂ©minitĂ© et la tendance du roman naturaliste Ă  excĂ©der les limites qu’il s’est fixĂ©s â€“ la description exacte du rĂ©el et la connaissance des vĂ©ritĂ©s humaines.

Avant mĂȘme sa parution (fort attendue) en feuilleton, Nana eut Ă  subir les foudres d’une bonne part de la critique bienpensante : depuis la publication de L’Assommoir en 1877, en effet, le chef de file du mouvement naturaliste est rĂ©guliĂšrement critiquĂ© par les camps idĂ©aliste et catholique pour l’immoralitĂ© dont ses ouvrages seraient porteurs. Zola pourtant n’a eu de cesse de dĂ©fendre son Ɠuvre au nom d’une « contre-morale8 Â» ayant le souci aigu de son lectorat (en particulier celui composĂ© des filles pauvres, dont il s’agit de prendre soin) : aussi, avant d’étudier en dĂ©tail ce que nous appellerons le « contre-care nanesque9 Â», convient-il d’opĂ©rer un rapide dĂ©tour d’histoire littĂ©raire consacrĂ© aux intentions conscientes-bienveillantes de Zola crĂ©ateur.

Nana ou la sollicitude lectoriale

La rĂ©daction de Nana rĂ©pond dans l’esprit de Zola Ă  un objectif de vĂ©ritĂ© morale : Ă  ses dĂ©tracteurs de tous bords idĂ©ologiques, qui l’accusent de manquer de sens moral en Ă©talant complaisamment les chairs fĂ©minines et les vices du grand monde dans son dernier roman, l’auteur du contemporain Roman expĂ©rimental rĂ©torque (comme il le fait depuis la prĂ©face Ă  la deuxiĂšme Ă©dition de ThĂ©rĂšse Raquin) en moraliste social. C’est qu’en un temps oĂč est sur le point d’ĂȘtre votĂ©e la loi de 1881 relative Ă  la libertĂ© de la presse (et oĂč, de maniĂšre plus gĂ©nĂ©rale, la libertĂ© de tout dire et de tout Ă©crire est de plus en plus ouvertement revendiquĂ©e10), la morale est comprise de maniĂšre strictement opposĂ©e par les uns et par les autres. Aux yeux des agents du vaste camp de la conservation, en effet, la morale est entendue restrictivement : appuyĂ©s sur l’éthique de la responsabilitĂ© socio-morale de l’écrivain dĂ©fendue jadis par saint Paul11, le critique catholique Armand de Pontmartin et ses confrĂšres Ăšs rĂ©actions prĂŽnent la discrĂ©tion et la re-tenue thĂ©matique et stylistique. Tout l’inverse de ce que propose Zola, en somme, son travail romanesque contenant « une forte profusion de vĂ©ritĂ©s dĂ©sagrĂ©ables12 Â» qu’il conviendrait de gazer afin de ne pas corrompre moralement le lecteur (et surtout la â€“ jeune â€“ lectrice) Ă  travers ce qui relĂšve de la plus dĂ©gradante pornographie. Pour le camp de la subversion, en revanche, la morale est entendue extensivement : aussi ne sert-il de rien d’enjoliver voire de cacher les choses du monde social, cette « fausse vertu Â» et cette « fausse pudeur13 Â» ne contribuant en rĂ©alitĂ© qu’à Ă©veiller la curiositĂ© et les sens des lecteurs, autrement dit Ă  produire l’effet inverse de celui initialement recherchĂ©. Ainsi Zola ne cesse-t-il de rĂ©pĂ©ter depuis la fin des annĂ©es 1860 dans les journaux que « [l]a morale est chose plus haute [que le gazage] ; elle ne s’offense pas des vĂ©ritĂ©s humaines, elle a besoin de connaĂźtre le rĂ©el et de se faire une sagesse du vice lui-mĂȘme14 Â». S’il est vrai que cette rhĂ©torique d’une contre-morale bienveillante fondĂ©e sur la monstration du vice est largement usitĂ©e au XIXe siĂšcle par des auteurs aux idĂ©aux et idĂ©ologies antagoniques en vue de se dĂ©fendre contre la bienpensance censoriale15, cela ne signifie pas que Zola se sert de formules (toutes faites) sans y croire â€“ non seulement celles-ci forment le socle esthĂ©tico-moral du naturalisme, mais on connaĂźt par ailleurs le combat durable de Zola en matiĂšre de moralitĂ© de la littĂ©rature et d’éducation des filles16. Et, de fait, en faisant naĂźtre Nana Ă  la vie de papier, l’auteur de L’Assommoir n’a-t-il pas voulu montrer Ă  ses lecteurs et lectrices une image vraie de la vie des « vraies filles Â», dit autrement dĂ©mythifier l’image (nĂ©faste car trompeuse) que les lecteurs et lectrices d’Hugo et de Dumas se font de la courtisane moderne ?

Eh bien ! mon intention a Ă©tĂ© simple. J’ai cherchĂ© Ă  mettre de l’humanitĂ© sous mes phrases ; j’ai eu l’ambition, sans doute trop grande, de vouloir planter debout une fille, la premiĂšre venue, comme il y en a peut-ĂȘtre plusieurs milliers Ă  Paris, et cela pour protester contre les Marion Delorme, les Dames aux camĂ©lias, les Marco, les Musette, toute cette sentimentalitĂ©, tout cet enguirlandage du vice, que je trouve dangereux pour les mƓurs et d’une influence dĂ©sastreuse sur les imaginations de nos filles pauvres. Je mets lĂ  la morale ; d’autres la mettent ailleurs [...]17.

Si donc le thĂšme de Nana n’est pas nouveau (puisque les personnages de courtisanes et de lorettes foisonnent dans le roman français du XIXe siĂšcle, ce qui fait d’eux de vĂ©ritables stĂ©rĂ©otypes littĂ©raires), il est nĂ©anmoins renouvelĂ© par un Zola ennemi de l’idĂ©alisme et du lyrisme romantique : Nana ne sera pas la pĂ©cheresse rĂ©habilitĂ©e par l’amour mais la reprĂ©sentante authentique de « la fille moderne Â», produit gĂątĂ© d’une sociĂ©tĂ© gĂątĂ©e qui, Ă  son tour et par « rĂ©flexe Â», « gĂąte le milieu18 Â». C’est dire qu’avec son roman aux prĂ©tentions scientifiques (l’auteur conclut son article du 12 janvier 1881 consacrĂ© Ă  « La fille au thĂ©Ăątre Â» en citant Claude Bernard) Zola cherche Ă  faire « Ć“uvre bonne Â», c’est-Ă -dire Ɠuvre « vraie Â», qui ne corrompt pas ses (jeunes) lecteurs et lectrices en les dĂ©tournant du rĂ©el mais les fortifie au contraire en les rendant sensibles Ă  une rĂ©alitĂ© sociale perfectible : « Rien n’est plus malsain pour les cƓurs et pour les intelligences que l’hypocrisie de certaines attĂ©nuations et que le jĂ©suitisme des passions contenues par les convenances19 Â».

Nana, idole monstrueuse « Ă  contre-care Â» ?

Quoi de plus appropriĂ©, pour dĂ©truire le mythe romantique de la courtisane dĂ©chue-repentie, que de « planter debout une fille, la premiĂšre venue Â», une bonne fille du peuple qui hĂ©rite de gĂ©nĂ©rations d’ivrognes et corrompt comme une « force inconsciente20 Â» tout ce qu’elle manipule ? Nana est en effet le personnage central du roman qui tout Ă  la fois organise le systĂšme des personnages (elle « attire ou fait disparaĂźtre dans son rayonnement des ĂȘtres fascinĂ©s par les apparitions ou les Ă©clipses de ce nouvel astre [...]21 Â») et « dĂ©sorganise22 Â» les familles et, plus gĂ©nĂ©ralement, la sociĂ©tĂ© de son temps (elle prĂ©cipite par son action dĂ©voratrice la chute du Second Empire). Zola fait donc porter sur son personnage de courtisane la charge politique-idĂ©ologique du roman, annoncĂ©e dĂšs La CurĂ©e : celle qui consiste Ă  faire tomber les masques sociaux, Ă  dĂ©noncer la dĂ©gĂ©nĂ©rescence d’un rĂ©gime politique minĂ© par le mĂ©lange des rangs et des genres â€“ l’aristocratie et la plĂšbe ; le plaisir de la chair et la grave Politique... DĂšs le chapitre d’ouverture du rĂ©cit, en effet, les diffĂ©rents « mondes Â» Ă©voquĂ©s par Zola dans ses premiĂšres notes prĂ©paratoires aux Rougon-Macquart23 s’assemblent au thĂ©Ăątre des VariĂ©tĂ©s pour se repaĂźtre de la nuditĂ© de Nana, signe du brouillage gĂ©nĂ©ralisĂ© des valeurs et des vertus Ă  la veille de la dĂ©faite de Sedan : parmi « cette cohue d’hommes aux lĂšvres sĂšches, aux yeux ardents, tout brĂ»lants encore de la possession de Nana24 Â» se trouvent le journaliste mondain Fauchery, le jeune Daguenet, le banquier lubrique Steiner, le provincial (et Ă©cervelĂ©) La Faloise, les comtes de Vandeuvres et Muffat ou encore le marquis de Chouard25. Autant de reprĂ©sentants des divers Ăąges de la vie et des diffĂ©rentes strates de la sociĂ©tĂ© impĂ©riale qui succomberont nĂ©anmoins tous au charme animal de Nana et s’empresseront dĂšs le deuxiĂšme chapitre dans l’antichambre de celle-ci, quitte Ă  la transformer en scĂšne de thĂ©Ăątre â€“ mieux : de vaudeville. Car si elle est une actrice (ratĂ©e), Nana est avant tout une « mangeuse d’hommes26 Â» (N, 359) qui s’apparente « Ă  la mante religieuse qu’évoque Mario Praz27 Â» dans La Carne, la morte e il diavolo nella letteratura romantica (1930). Aussi asservit-elle l’ensemble de ses amants avant de les ruiner voire de les mettre Ă  mort (le jeune et romantique Georges Hugon ne se suicide-t-il pas par dĂ©sespoir amoureux et le comte de Vandeuvres, par dĂ©sespoir financier ?) :

Nana, en quelques mois, les mangea goulĂ»ment, les uns aprĂšs les autres. Les besoins croissants de son luxe enrageaient ses appĂ©tits, elle nettoyait un homme d’un coup de dent. D’abord, elle eut Foucarmont qui ne dura pas quinze jours. Il rĂȘvait de quitter la marine, il avait amassĂ© en dix annĂ©es de voyages une trentaine de mille francs qu’il voulait risquer aux États-Unis ; et ses instincts de prudence, d’avarice mĂȘme, furent emportĂ©s, il donna tout, jusqu’à des signatures sur des billets de complaisance, engageant son avenir. Lorsque Nana le poussa dehors, il Ă©tait nu. [...] Un homme ruinĂ© tombait de ses mains comme un fruit mĂ»r, pour se pourrir Ă  terre, de lui-mĂȘme. Ensuite, Nana se mit sur Steiner, sans dĂ©goĂ»t, mais sans tendresse. Elle le traitait de sale juif, elle semblait assouvir une haine ancienne, dont elle ne se rendait pas bien compte. [...] Son affaire du Bosphore commençait Ă  pĂ©ricliter. Nana prĂ©cipita l’écroulement par des exigences folles. [...] D’autre part, il s’était associĂ© avec un maĂźtre de forges, en Alsace ; il y avait lĂ -bas, dans un coin de province, des ouvriers noirs de charbon, trempĂ©s de sueur, qui, nuit et jour, raidissaient leurs muscles et entendaient craquer leurs os, pour suffire aux plaisirs de Nana. Elle dĂ©vorait tout comme un grand feu, les vols de l’agio, les gains du travail. [...] Alors, Nana, tout de suite, entama la Faloise. Il postulait depuis longtemps l’honneur d’ĂȘtre ruinĂ© par elle, afin d’ĂȘtre parfaitement chic. [...] Le triomphe de Nana fut de l’avoir [Fauchery] et de lui manger un journal [...] (N, 426-428).

Mais aucun des amants susmentionnĂ©s n’est « mangĂ© Â» comme le comte Muffat, chambellan de l’impĂ©ratrice et fervent catholique dont la vie rangĂ©e est bouleversĂ©e du fait de sa rencontre avec Nana. Figure double de la tentation diabolique et de la femme fatale, Nana corrompt progressivement cet « homme comme il faut Â», qui incarne « la fascination invincible mĂȘlĂ©e de rĂ©pugnance et d’effroi que Nana exerce sur l’homme en gĂ©nĂ©ral28 Â». Le pouvoir que la jeune femme dĂ©tient sur son amant est tellement absolue que les rapports sociaux de service s’en trouvent renversĂ©s. Ainsi, lorsque Nana contraint Muffat Ă  apporter chez elle son costume de chambellan et Ă  le piĂ©tiner, elle fait plus que dĂ©noncer « cette “bonne” sociĂ©tĂ© qui joue l’honnĂȘtetĂ©29 Â» : elle transforme le serviteur impĂ©rial (en robe « de service Â») en l’esclave (nu) d’une femme galante ; dit autrement, elle passe de la servante (asservie socialement) Ă  celle qui est servie, c’est-Ă -dire qui asservit.

On comprend donc pourquoi Flaubert affirme que Nana « tourne au mythe Â» : tantĂŽt MĂ©duse (les spectateurs de La Blonde VĂ©nus ne sortent-ils pas « mĂ©dusĂ©s Â» du thĂ©Ăątre des VariĂ©tĂ©s ?), tantĂŽt SalomĂ© (comment oublier l’image, au pied de l’actrice, de « la tĂȘte du souffleur, une tĂȘte de vieil homme [...] posĂ©e comme coupĂ©e, avec un air pauvre et honnĂȘte Â» [N, 169] ?), Nana semble tout droit sortie du rĂ©pertoire fĂ©minin du romantisme noir, « idole redoutĂ©e Â» (N, 434) dĂ©cimant tout sur son passage, quitte Ă  laisser des indices sanglants ayant valeur d’avertissement â€“ on pense Ă  la tache de sang laissĂ©e par Georges Ă  l’entrĂ©e de la chambre de la courtisane. Bref, Ă  travers la monstrueuse Nana (traduction romanesque de la « vision catastrophique de la sexualitĂ©30 Â» zolienne), c’est Ă  la force terrifiante du sexe fĂ©minin que les lecteurs et lectrices sont introduits.

Mais si la jeune femme revĂȘt d’inquiĂ©tantes allures mythiques, elle ne « cess[e] [pourtant] d’ĂȘtre rĂ©elle Â» : n’est-elle pas le double fictionnel de courtisanes ayant brillĂ© sous le Second Empire ? Par ailleurs, il ne convient pas de surestimer le mal dont Nana serait intrinsĂšquement porteuse : n’est-elle vraiment que malveillante ? Et, lorsqu’elle l’est, l’est-elle toujours intentionnellement, telle la SalomĂ© fin-de-siĂšcle (dĂ©)peinte tour Ă  tour par Flaubert, Moreau, Huysmans et Wilde ? Car s’il est vrai qu’en plus de la servitude qu’elle impose Ă  ses amants, Nana peut ĂȘtre jugĂ©e (au plan symbolique) incestueuse et infanticide31, certains passages du roman soulignent sa sollicitude Ă  l’égard des autres (y compris son fils, lors de ses crises maternelles) et son innocence retrouvĂ©e : on pense aux soins que la jeune femme apporte Ă  Georges Hugon, Ă  Fontan puis Ă  Satin et au sĂ©jour purificateur passĂ©e Ă  la Mignotte. Quant aux intentions malveillantes de Nana, tout indique qu’elles sont rares : c’est que dans l’esprit de Zola, Nana incarne la revanche inconsciente des dominĂ©.e.s sur les dominants. Par son existence et son action contaminante (mais, rĂ©pĂ©tons-le, inconsciente : c’est « Ă  contrecƓur Â» que s’opĂšre le « contre-care nanesque Â»), la « mouche d’or32 Â» issue du peuple venge ses semblables en participant Ă  la destruction de la sociĂ©tĂ© viciĂ©e qui l’a crĂ©Ă©e :

Comme ces monstres antiques dont le domaine redoutĂ© Ă©tait couvert d’ossements, elle posait les pieds sur des crĂąnes, et des catastrophes l’entouraient, la flambĂ©e furieuse de Vaudeuvres, la mĂ©lancolie de Foucarmont perdu dans les mers de la Chine, le dĂ©sastre de Steiner rĂ©duit Ă  vivre en honnĂȘte homme, l’imbĂ©cillitĂ© satisfaite de la Faloise, et le tragique effondrement des Muffat, et le blanc cadavre de Georges, veillĂ© par Philippe, sorti la veille de prison. Son Ɠuvre de ruine et de mort Ă©tait faite, la mouche envolĂ©e de l’ordure des faubourgs, apportant le ferment des pourritures sociales, avait empoisonnĂ© ces hommes, rien qu’à se poser sur eux. C’était bien, c’était juste, elle avait vengĂ© son monde, les gueux et les abandonnĂ©s. Et tandis que, dans une gloire, son sexe montait et rayonnait sur ses victimes Ă©tendues, pareil Ă  un soleil levant qui Ă©claire un champ de carnage, elle gardait son inconscience de bĂȘte superbe, ignorante de sa besogne, bonne fille toujours. Elle restait grosse, elle restait grasse, d’une belle santĂ©, d’une belle gaietĂ© (N, 442-443).

Bref, la fille Nana est fonciĂšrement double, profondĂ©ment ambivalente : tout ensemble mĂšre et amante, sadique et masochiste, malveillante et bienveillante. Équivoque, en somme, alors qu’on pouvait la croire univoque, insondable alors qu’on pouvait la penser diaphane, secrĂšte alors qu’elle paraissait... publique.


S’il y a une poĂ©t(h)ique du contre-care dans Nana, celle-ci s’entrevoit d’abord dans la maniĂšre dont Zola entend prendre soin de ses lecteurs et lectrices : en prĂ©sentant la vie rĂ©elle des courtisanes du Second Empire (les principaux types de « filles Â» et de vices sont reprĂ©sentĂ©s dans le roman), l’auteur des Rougon-Macquart, on l’a vu, souhaite prĂ©server les mƓurs et « les imaginations de nos filles pauvres Â» : entourer les Marion, Marco et autres Musette d’une aura de sentimentalitĂ©, « enguirland[er] [leur] vice Â» ne peut en effet avoir pour consĂ©quence que la destruction du sens moral de la sociĂ©tĂ©. En somme, il s’agit pour Zola de dĂ©fendre une contre-morale de la transparence bienveillante (via en particulier la mise en scĂšne d’une prostituĂ©e nue, « figuration allĂ©gorique de la littĂ©rature vraie33 Â») opposĂ©e Ă  la morale idĂ©aliste de la feuille de vigne. Mais cette poĂ©t(h)ique susmentionnĂ©e va plus loin : en faisant d’une « belle pĂ©cheresse Â» tout Ă  la fois la rĂ©vĂ©latrice (effrayante) et la vengeresse (inconsciente) des vices du rĂ©gime impĂ©rial et du peuple asservi, Zola façonne un « contre-care nanesque Â» qui ne prĂ©cipite la chute de l’Empire que pour (tenter de) faire naĂźtre un monde plus juste et ouvert au progrĂšs. C’est que sous l’observateur impassible se laisse toujours deviner le rĂ©formateur social.


Références bibliographiques

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  1. Pour avoir quelques aperçus des relations entre care et prostitution dans la littĂ©rature française du tournant des XIXe et XXe siĂšcles, voir (entre autres) les Ă©tudes suivantes : Caroline Hogue, « Madame Edwarda : la prostituĂ©e qui dĂ©borde Â», À votre service, 2021, https://avotreservice.net/notes/madame-edwarda (page consultĂ©e le 6 mai 2022) ; JĂ©rĂ©my Champagne, « Le Journal d’une femme de chambre, ou le care ambivalent de la domesticitĂ© Â», 2022, À votre service, 2022, https://avotreservice.net/notes/mirbeau-chambre (page consultĂ©e le 6 mai 2022) et Charles Plet, « Le DĂ©sespĂ©rĂ© de LĂ©on Bloy : une mystique du prendre soin Â», À votre service, 2022, https://avotreservice.net/notes/bloy-desespere (page consultĂ©e le 6 mai 2022).↩

  2. Chantal Pierre-Gnassounou, « Introduction Ă  Nana Â», Émile Zola. ƒuvres complĂštes, tome 9, Paris, Nouveau Monde Éditions, 2004, p. 13.↩

  3. Armand de Pontmartin, « M. Émile Zola. Le roman expĂ©rimental Â», dans Souvenirs d’un vieux critique, premiĂšre sĂ©rie, Paris, Calmann-LĂ©vy, 1881, p. 149.↩

  4. Sur le care Ă  l’Ɠuvre dans ces deux romans, voir Hans-Érik Filfe-Leitner, « Marthe, l’histoire d’une fille : la “vie plus effroyable que toutes les gĂ©hennes” Â», À votre service, 2021, https://avotreservice.net/notes/histoire-dune-fille (page consultĂ©e le 6 mai 2022) et Louise Nayagom, « Transmission du care de mĂšre en fille : La Fille Élisa d’Edmond de Goncourt Â», À votre service, 2022, https://avotreservice.net/notes/fille-elisa (page consultĂ©e le 30 juillet 2022).↩

  5. Sur le « travail sexuel Â» comme « travail de care Â», voir Sandra Laugier, Pascale Molinier, FrĂ©dĂ©ric Bisson et Anne Querrien, « Prenons soin des putes Â», Multitudes, no 48, 2012, p. 32-37.↩

  6. Émile Zola, Nana, postface et notes d’Alain PagĂšs, Paris, Seuil, 1994 [1880], « Postface Â», p. 529.↩

  7. « Nana tourne au mythe, sans cesser d’ĂȘtre rĂ©elle. Cette crĂ©ation est babylonienne Â» (lettre de Gustave Flaubert Ă  Émile Zola du 15 fĂ©vrier 1880, citĂ©e dans ƒuvres complĂštes, Correspondance 1877-1880, tome 16, Paris, Club de l’HonnĂȘte Homme, 1975, p. 322).↩

  8. Entendre : une morale Ă  la fois « contraire Ă  Â» et « posĂ©e contre Â» la morale en position de dominance sociale. Zola, en effet, ne cesse d’affirmer aux alentours de 1880 qu’il « compren[d] la morale d’une autre façon Â» ; qu’il « me[t] lĂ  la morale Â» ; qu’« [o]n a tort de croire que l’idĂ©e de morale est la mĂȘme partout Â» (« La Fille au thĂ©Ăątre Â», Le Figaro, no 12, 12 janvier 1881 ; « Revue dramatique et littĂ©raire Â», Le Voltaire, no 480, 28 octobre 1879 et « Comment elles poussent Â», Le Figaro, no 52, 21 fĂ©vrier 1881).↩

  9. Pour emprunter aux vignettes des caricaturistes de l’époque, qui s’amusaient du roman « nanaturaliste Â» et des Ă©preuves « nanatomiques Â» Ă©talĂ©es par celui-ci.↩

  10. On pense notamment Ă  la retentissante querelle mĂ©diatique opposant Ferdinand BrunetiĂšre au sceptique Anatole France autour de 1900. Voir GisĂšle Sapiro, « AutoritĂ© et responsabilitĂ© de l’écrivain : les conditions d’émergence de la figure de l’intellectuel prophĂ©tique sous la TroisiĂšme RĂ©publique Â», dans Emmanuel Bouju (dir.), L’autoritĂ© en littĂ©rature, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2010, p. 265-276.↩

  11. Saint Paul conseille de traiter par le silence certains sujets (potentiellement) corrupteurs comme l’amour sensuel ou l’adultĂšre (« Qu’on n’entende pas seulement parler parmi vous ni de fornication, ni de quelque impuretĂ© que ce soit, ni d’avarice, comme on ne doit point en entendre parler parmi des saints Â» : Ă©pĂźtre aux ÉphĂ©siens 5:3).↩

  12. Armand de Pontmartin, loc. cit., p. 150.↩

  13. Émile Zola, « De la moralitĂ© dans la littĂ©rature Â», Le Messager de l’Europe, octobre 1880.↩

  14. Émile Zola, « Causerie Â», La Tribune, 9 aoĂ»t 1868.↩

  15. On pense aux catholiques hĂ©tĂ©rodoxes Barbey, Huysmans et Bloy, qui ne cessĂšrent de condamner l’idĂ©ologie de la « feuille de vigne Â» dĂ©fendue alors par le camp catholique autorisĂ©.↩

  16. « Le problĂšme de l’éducation des filles hante Les Rougon-Macquart : Zola ne consacre que fort peu de pages Ă  l’éducation des garçons. [...] C’est que seule l’éducation des filles pose un rĂ©el problĂšme en un siĂšcle qui n’a guĂšre su instruire que ses garçons Â» : Patricia Carles et BĂ©atrice Desgranges, « Le cauchemar de l’éducation des filles. Notes sur “Le RĂȘve” de Zola Â», Romantisme, no 63, 1989, p. 24.↩

  17. Émile Zola, « Revue dramatique et littĂ©raire Â», loc. cit.↩

  18. Émile Zola, « La Fille au thĂ©Ăątre Â», loc. cit.↩

  19. Émile Zola, citĂ© dans Jean-Marie Seillan, « StĂ©rĂ©otypie et roman mondain : l’Ɠuvre d’Octave Feuillet Â», Loxias, no 17, http://revel.unice.fr/loxias/index.html?id=1684 (page consultĂ©e le 3 mai 2022).↩

  20. Émile Zola, « La Fille au thĂ©Ăątre Â», loc. cit.↩

  21. Émile Zola, Nana, commentaires et notes d’Auguste Dezalay, Paris, Librairie GĂ©nĂ©rale Française, 1997 [1880], « Commentaires Â», p. 489.↩

  22. Émile Zola, « La Fille au thĂ©Ăątre Â», loc. cit.↩

  23. Zola distingue quatre « mondes Â» principaux (le peuple, les commerçants, la bourgeoisie et le grand monde) et un « monde Ă  part Â» (dans lequel s’inscrivent le meurtrier, le prĂȘtre, l’artiste et la putain).↩

  24. Émile Zola, Nana, prĂ©sentation par Marie-Ange FougĂšre, Paris, Flammarion, 2000 [1880], p. 56. DorĂ©navant, les rĂ©fĂ©rences Ă  cette Ă©dition de Nana seront indiquĂ©es entre parenthĂšses dans le corps du texte par le signe N, suivi du numĂ©ro de page.↩

  25. D’autres passages du roman Ă©voquent le mĂ©lange des mondes sociaux : n’oublions pas en effet que ce sont les mĂȘmes hommes qui sont prĂ©sents Ă  la soirĂ©e chez les Muffat et au dĂźner chez Nana, et que le jour de la signature du contrat de mariage entre Estelle Muffat et Daguenet, l’orchestre joue la valse de La Blonde VĂ©nus. Et c’est pour ne rien dire de la scĂšne durant laquelle le prince d’Écosse boit du champagne avec le « roi Dagobert Â» (le vieux Bosc) dans la loge de Nana.↩

  26. Voir Roland Barthes, « La mangeuse d’hommes Â», Guilde du Livre, no 6, juin 1955, p. 226-228. Notons que Nana est Ă©galement â€“ mais d’une autre maniĂšre â€“ une « mangeuse de femmes Â» : ne corrompt-elle pas en effet la comtesse Sabine qui, « gĂątĂ©e par la promiscuitĂ© de cette fille poussĂ©e Ă  tout [Nana], devenait l’effondrement final, la moisissure mĂȘme du foyer Â» (N, 437), bref l’équivalent aristocratique de Nana ?↩

  27. Chantal Jennings, « Les trois visages de Nana Â», The French Review, no 2, 1971, p. 123.↩

  28. Ibid., p. 122.↩

  29. Émile Zola, Les Rougon-Macquart, Ă©dition Ă©tablie par Colette Becker avec la collaboration de Gina Gourdin-ServeniĂšre et VĂ©ronique Lavielle, Paris, Robert Laffont, 1992, « PrĂ©face Â» par Colette Becker, p. 17.↩

  30. Ibid., p. 19.↩

  31. On ne compte plus en effet le nombre de fois oĂč Nana appelle Georges Hugon (futur suicidĂ©) son « bĂ©bĂ© Â» ou son « enfant Â». Sur ce point, voir Pascale Krumm, « Nana maternelle : oxymore ? Â», The French Review, no 2, 1995, p. 217-228.↩

  32. « Muffat lisait lentement. La chronique de Fauchery, intitulĂ©e “La mouche d’or”, Ă©tait l’histoire d’une fille, nĂ©e de quatre ou cinq gĂ©nĂ©rations d’ivrognes, le sang gĂątĂ© par une longue hĂ©rĂ©ditĂ© de misĂšre et de boisson, qui se transformait chez elle en un dĂ©traquement nerveux de son sexe de femme. Elle avait poussĂ© dans un faubourg, sur le pavĂ© parisien ; et, grande, belle, de chair superbe ainsi qu’une plante de plein fumier, elle vengeait les gueux et les abandonnĂ©s dont elle Ă©tait le produit. Avec elle, la pourriture qu’on laissait fermenter dans le peuple remontait et pourrissait l’aristocratie. Elle devenait une force de la nature, un ferment de destruction, sans le vouloir elle-mĂȘme, corrompant et dĂ©sorganisant Paris entre ses cuisses de neige, le faisant tourner comme des femmes, chaque mois, font tourner le lait. Et c’était Ă  la fin de l’article que se trouvait la comparaison de la mouche, une mouche couleur de soleil, envolĂ©e de l’ordure, une mouche qui prenait la mort sur les charognes tolĂ©rĂ©es le long des chemins, et qui, bourdonnante, dansante, jetant un Ă©clat de pierreries, empoisonnait les hommes rien qu’à se poser sur eux, dans les palais oĂč elle entrait par les fenĂȘtres Â» (N, 222-223). On se souvient qu’à la demande de Zola, le directeur du Voltaire publie cet extrait du chapitre VII dans le numĂ©ro du 16 septembre. Selon l’auteur, ce passage contient « toute l’idĂ©e morale et philosophique Â» du roman (lettre d’Émile Zola Ă  Jules Laffitte du 15 septembre 1879, citĂ©e dans ÉlĂ©onore Reverzy, ÉlĂ©onore Reverzy commente Nana d’Émile Zola, Paris, Gallimard, 2008, p. 182).↩

  33. ÉlĂ©onore Reverzy, Portrait de l’artiste en fille de joie. La littĂ©rature publique, Paris, CNRS Ă©ditions, 2016, p. 217.↩

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