Article : « Apocalypse postmoderne 2 : le roman clinique ou le personnel malade du roman post-génocide francophone »
Dans un article paru dans la Revue critique de fixxion française contemporaine, Alain Serge Agnessan interroge les romans cliniques, un sous-genre du roman postcolonial francophone, et la représentation de personnages de malades qui influencent la forme même de l’œuvre. Le texte est disponible sur le site web de la revue.
Description :
Des personnages en phase terminale de cancer (Les jours viennent et passent de Hemley Boum et Explication de la nuit d’Edem Awumey) aux personnages souffrant du sida (Cueillez-moi, jolis Messieurs de Bessora), il semble bien que, depuis le génocide tutsi de 1994, le roman postcolonial francophone se met au chevet de personnages malades. Ce nouvel infléchissement a été très peu lu par la critique africaine francophone qui a préféré y voir un effet extrême contemporain de revenance du personnel des romans de la dictature et de la guerre. Toutefois, si l’on veut bien admettre que l’apparition d’un nouveau type de personnage entraîne l’émergence de formes romanesques inédites, il serait théoriquement fécond d’observer comment ces romans, que je nomme cliniques, envisagent le délabrement du corps malade, la vulnérabilité de la mémoire et l’inquiétude du présent postcolonial comme de nouvelles voies d’exploration de l’engagement littéraire. Entre urgence de raconter, urgence de témoigner et urgence de guérir, le personnage du roman clinique tente, grâce au pouvoir du récit, de résister aussi bien à l’effacement du monde qu’à l’apocalypse intime qui l’ébranle. Poursuivant une série d’études dont la première a analysé la logique postmoderne des utopismes post-génocides, cet article entend diagnostiquer la part maudite du personnel malade de ces romans qui désirent « réparer le monde » (Gefen, 2017).